Photo : Parachutage de vivres sur Gaza, 1er mars 2024 © Roi Abdullah II de Jordanie
Les autorités jordaniennes ont tiré un profit considérable de la supervision de l’acheminement de l’aide internationale à Gaza pendant la guerre menée par Israël contre l’enclave palestinienne assiégée, a appris Middle East Eye.
Des sources indiquent que l’Organisation caritative hachémite jordanienne (JHCO), un organisme officiel chargé de superviser l’aide humanitaire à Gaza, s’est coordonnée avec les autorités israéliennes pour agir en tant qu’unique intermédiaire pour l’aide passant par la Jordanie.
MEE s’est entretenu avec des sources d’organisations d’aide internationale et des personnes ayant une connaissance directe des opérations de la JHCO.
Une source a déclaré qu’une grande partie de l’aide attribuée au JHCO provient en fait de gouvernements étrangers et d’ONG, jordaniennes et internationales, tandis que les contributions directes de l’État jordanien sont négligeables.
Les autorités jordaniennes ont exigé 2 200 dollars pour chaque camion d’aide entrant dans Gaza, selon deux sources d’ONG et deux autres personnes connaissant bien le système.
Les organisations d’aide ont été informées par le JHCO que ces frais étaient versés directement aux forces armées jordaniennes.
En outre, la Jordanie a facturé entre 200 000 et 400 000 dollars par largage au-dessus de Gaza, selon les sources.
Environ 200 000 dollars ont été facturés pour chaque largage aléatoire et 400 000 dollars pour les missions ciblées, bien que chaque avion transporte l’équivalent de moins d’un demi-camion d’aide.
Les sources ont déclaré que la Jordanie avait développé son infrastructure logistique en réponse à l’augmentation des revenus provenant des opérations d’aide.
Selon les sources de MEE, le royaume a récemment acquis 200 nouveaux camions d’aide grâce à une subvention étrangère et construit de plus grands dépôts de stockage soutenus par l’ONU en prévision de l’augmentation des livraisons dans le cadre des nouveaux accords internationaux.
Middle East Eye a demandé des commentaires au ministère jordanien des Affaires étrangères, aux forces armées et au JHCO, mais n’a reçu aucune réponse au moment de la publication.
Une aide insuffisante
Depuis le déclenchement de la guerre d’Israël contre Gaza, les dirigeants jordaniens ont dû faire face à un sentiment anti-israélien croissant dans leur pays tout en maintenant leurs relations stratégiques avec le pays.
La Jordanie compte une importante population issue de réfugiés palestiniens contraints de fuir la Palestine historique après les expulsions massives de 1948, largement connues sous le nom de Nakba.
Au cours des premiers mois de la guerre, des manifestations de masse en faveur de Gaza et des factions palestiniennes, en particulier le Hamas, ont régulièrement eu lieu en Jordanie.
Sous la pression intérieure croissante, l’armée jordanienne a commencé à parachuter de l’aide à Gaza environ un mois après le début de la guerre et l’imposition d’un siège total par Israël.
Depuis lors, la Jordanie a mené environ 400 opérations de parachutage, dont certaines en coordination avec d’autres pays, selon l’armée.
Le roi Abdallah II lui-même a participé à au moins une de ces missions, qui étaient toutes organisées à l’avance avec l’armée israélienne.
Ces largages ont fait l’objet de nombreuses critiques, notamment de la part des habitants de Gaza et des travailleurs humanitaires.
Ils affirment que ces largages, qui ont parfois tué ou blessé des Palestiniens, sont dangereux, inadéquats et inutiles, en particulier lorsque les points de passage terrestres restent une voie plus viable pour l’acheminement de l’aide.
Les autorités jordaniennes affirment également avoir envoyé au moins 140 convois d’aide par voie terrestre depuis le début de la guerre, chacun transportant plusieurs camions de secours.
Ces convois ont également été soumis à l’approbation et à la coordination d’Israël avant d’atteindre l’enclave assiégée.
Selon les responsables palestiniens de la bande de Gaza, 500 camions de fournitures étaient nécessaires chaque jour dans les conditions d’avant-guerre, un besoin qui n’a pas été satisfait depuis le début de l’assaut israélien, il y a 19 mois.
Le 9 octobre 2023, deux jours après l’assaut du Hamas contre Israël, l’ancien ministre israélien de la défense Yoav Gallant, aujourd’hui recherché par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre présumés, a décrété un « siège total » de la bande de Gaza.
Bien qu’une aide limitée et des biens commerciaux aient parfois pénétré dans la bande de Gaza, le siège est resté en grande partie intact.
Le 2 mars, Israël a réimposé un blocus total. Au cours des deux mois qui ont suivi, aucune aide ou marchandise n’est entrée à Gaza, poussant l’enclave à ce que certaines agences d’aide qualifient de « niveau de famine catastrophique ».
Traduction : AFPS